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Sur les rives de la Neva
Le hussard est beau, nonchalamment adossΘ α une colonne, son costume impeccable, l'attitude respectueusement conquΘrante. On note chez lui un savant mΘlange de sauvagerie et de sophistication. PrΦs de lui, une femme, une ImpΘratrice, Catherine II de Russie, grande par la puissance politique mais aussi par le pouvoir de sΘduction. Tout ceci dans un film en noir et blanc, voilα pour l'inspiration de cette seconde collection de couture. Orchestre de village, violon α faire pleurer l'Γme de la Dame au Petit Chien, coiffures extraordinaires de Monsieur Alexandre, maquillages signΘs FrΘdΘric Farrugia pour regards de feu de princesses en dΘtresse, la Conciergerie qui vit mourir sur l'Θchafaud une reine bucolique devint, le temps d'un dΘfilΘ, une datcha impΘriale dont l'Θclairage aux nombreuses bougies soulignait la magnificence.
Romanesque et animale, utilisant en tout ce contraste entre sauvagerie et sophistication, cette collection raconte l'histoire d'une femme moderne et multiple. Elle aime tout α condition que tout ait de la personnalitΘ, du style, de l'ΘlΘgance. La coupe d'abord qui fait le buste court, la taille haute, l'ampleur dΘcisive sur les hanches, l'arrondi oeuf du dos. Les matiΦres ensuite qui toujours s'amusent des effets glissants et crissants, ce petit bruit si fΘminin dans le mouvement. Les taffetas, les failles, les soies, la fourrure, les mΘlanges stretch de la modernitΘ tout est lα pour une garde-robe de roman. Proust? Non. Plut⌠t Pouchkine, la beautΘ de l'effigie, l'imminence du drame. Le jour dessine le corps, veston α dos arrondi, pantalon droit et large, fourreau stretch ouvert sur jambe gainΘe de couleur et fourragΦre de diamants. Le soir prend de l'ampleur et se joue sur le mode des splendeurs oniriques d'une cour impΘriale imaginaire propulsΘe dans les annΘes 90. Travail d'artisan dans les broderies, les pampilles et les brandebourgs, travail de coloriste sur pelisse de moujik sΘduit (toujours des hommes dans les dΘfilΘs de Jean-Paul Gaultier), riviΦres de diams sur costume masculin, et peau de panthΦre des territoires lointains entiΦrement brodΘe en tablier de reine sur robe de faille? Animal encore, ces fourreaux de velours ou celui que l'on porte pour l'office religieux, noir absolument, une ic⌠ne brodΘe et pailletΘe dont les panneaux s'ouvrent sur les seins.
Les splendeurs des cours impΘriales se retrouvent ici mais rΘimaginΘes pour aujourd'hui: les matiΦres et les coupes utilisent les technologies modernes, l'attitude est diffΘrente, les porters plus ludiques. L'extravagance est α l'honneur, celle d'un coup de folie, renouer avec un Θternel fΘminin sans concessions.