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Text File  |  1996-08-11  |  7KB  |  16 lines

  1.     Devant la tension internationale, le gouvernement canadien passa aussi au r├⌐armement tout en approuvant et en appuyant chaleureusement les efforts britanniques en vue d'une solution pacifique. Au d├⌐but de 1937, le gouvernement pr├⌐senta au Parlement un budget de 36 millions de dollars pour couvrir les d├⌐penses de d├⌐fense nationale au cours de l'ann├⌐e suivante -- ce qui repr├⌐sentait environ les 2/3 des chiffres de 1934. Le gouvernement soutenait que cet argent serait employ├⌐ ├á la d├⌐fense du Canada, mais de nombreux citoyens n'en ├⌐taient pas convaincus. Le d├⌐put├⌐ lib├⌐ral pour Toronto Spadina d├⌐clara ├á la Chambre des Communes qu'il avait re├ºu ┬½litt├⌐ralement des centaines de communications de ses propres ├⌐lecteurs qui ├⌐taient hostiles ├á cette augmentation┬╗. La majorit├⌐ des lettres ├⌐manaient ┬½d'hommes de bonne souche an- glo-saxonne. J'ai ├⌐galement re├ºu un certain nombre de lettres de ministres de l'├ëvangile, de professeurs de l'Universit├⌐ de Toronto, d'├⌐tudiants, d'organisations f├⌐minines et de pr├⌐sidents d'associations familiales et scolaires, qui s'opposaient tous ├á l'augmentation des d├⌐penses du Minist├¿re de la D├⌐fense nationale, la consid├⌐rant comme une pr├⌐paration en vue de la guerre, comme une entr├⌐e du Canada dans une course aux armements.┬╗ Ou, comme le disait un d├⌐put├⌐ canadien-fran├ºais: ┬½ . . . D├⌐fendre le Canada! contre qui et contre quoi? o├╣ se trouve cette menace subite qui n├⌐cessite des d├⌐penses si consid├⌐rables ├á des fins de d├⌐fense? ├á l'├⌐tranger ou chez nous? . . . Nos voisins n'ont pas chang├⌐ et ils sont tout aussi pacifiques qu'avant. Notre situation g├⌐ographique est la m├¬me et il y a toujours des oc├⌐ans pour nous s├⌐parer de l'Europe et de l'Asie, ce qui veut dire que nous jouissons d'une s├⌐curit├⌐ presque absolue.┬╗
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  3.      Le budget de la d├⌐fense fut facilement adopt├⌐. Mais tout ceci renfor├ºa King dans la conviction que l'agitation outre-Atlantique ajoutait in├⌐vitablement aux forces qui divisaient d├⌐j├á les Canadiens. La t├óche principale du parti lib├⌐ral ├⌐tait donc de sauvegarder l'unit├⌐ de la nation canadienne, une unit├⌐ que King estimait vraiment tr├¿s fragile. Comme le Premier ministre le disait aux membres de son parti en 1937:
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  5.      . . . si nous regardons autour de nous, que trouvons-nous: d'├⌐tranges forces ├á l'oeuvre dans presque toutes les provinces et qui m├¿nent ├á l'├⌐cart├¿lement. Prenez l'Alberta -- il fait de sinistres efforts pour d├⌐fier le reste du Canada et pr├¬che l'isolement ├⌐conomique; et cela peut conduire ├á une s├⌐paration politique. Prenez la province de Qu├⌐bec, o├╣ on se prononce ouvertement en faveur de l'├⌐tablissement d'une r├⌐publique sur le Saint-Laurent; o├╣ l'antique v├⌐n├⌐ration pour la Conf├⌐d├⌐ration a disparu pour faire place ├á une vague de s├⌐paratisme. Prenez le Nouveau-Brunswick, dont certains des hommes au pouvoir disent qu'ils n'appartiennent pas ├á une province canadienne, mais ├á une province du Royaume-Uni; l├á encore l'oeuvre de la Conf├⌐d├⌐ration est menac├⌐e. On pourrait trouver des tendances semblables pratiquement dans toutes les provinces. Mais o├╣ cela nous m├¿nerait-il? O├╣ est notre devoir -- cela est clair, c'est d'├¬tre unis au point de vue politique et de reconna├«tre que l'unit├⌐ du pays est primordiale -- et nous devons sauvegarder cette unit├⌐ ├á tout prix.
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  7. La r├⌐ponse de King m├⌐nageait la ch├¿vre et le chou: personne ne saurait exactement quelle ├⌐tait sa position sur les questions de politique ext├⌐rieure ou de d├⌐fense nationale.
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  9.      Cependant King ├⌐tait r├⌐solu ├á venir en aide ├á la Grande-Bretagne si une grande guerre ├⌐clatait. En septembre 1938, ├á l'├⌐poque o├╣ la guerre entre les Allemands et les Britanniques ├á propos de la Tch├⌐coslovaquie semblait imminente, King confiait ├á son journal qu'il ├⌐tait pr├¬t ├á insister aupr├¿s d'un cabinet divis├⌐ pour faire admettre que le Canada se devait de faire ┬½tout ce qui est en son pouvoir pour d├⌐truire les puissances dont la politique est fond├⌐e sur la force et non sur le droit . . . Dans une telle situation, je ne songerais pas un instant ├á opter pour la neutralit├⌐.┬╗ Quand le Premier ministre britannique, Neville Chamberlain r├⌐solut la crise en accordant ├á Hitler tout ce qu'il voulait, pourvu qu'il consente ├á la recevoir pacifiquement, comme ├á peu pr├¿s tout le monde, King poussa un soupir de soulagement. Il ne serait pas n├⌐cessaire de mettre l'unit├⌐ nationale ├á l'├⌐preuve avant que les Canadiens soient tout ├á fait pr├¬ts. Un des tr├¿s rares opposants des Accords de Munich, J.W. Dafoe, l'influent r├⌐dacteur en chef du Winnipeg Free Press, pratiquement le seul des journaux canadiens-anglais ├á couvrir r├⌐guli├¿rement les ├⌐v├⌐nements ├⌐trangers et ├á en faire l'analyse, d├⌐non├ºa ces m├¬mes Accords dans un vigoureux ├⌐ditorial: ┬½Pourquoi ces applaudissements?┬╗, dans lequel il proposait une formule pour d├⌐crire l'agression nazie: ┬½(Celle-ci rejette comme sans valeur les accords, engagements, promesses, garanties quand ils interf├¿rent avec sa soif d'agression et la puissance n├⌐cessaire pour l'├⌐tancher. Hier, c'├⌐tait l'Autriche, aujourd'hui la Tch├⌐coslovaquie; que nous r├⌐servent demain et les jours qui suivront?┬╗
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  11.      Comme l'avait craint Dafoe, les alarmes de guerre ne s'arr├¬t├¿rent pas l├á. Malgr├⌐ l'ambigu├»t├⌐ permanente des d├⌐clarations de King, Ernest Lapointe d├⌐clarait ├á la Chambre des Communes, en mars 1939, que le Canada ┬½ne pouvait pas s'attendre ├á ├¬tre une oasis au milieu des conflits et des d├⌐sastres auxquels il serait le seul ├á ├⌐chapper.┬╗ Les Canadiens n'├⌐taient pas ├á l'abri d'une ├⌐ventuelle attaque. Qui pouvait pr├⌐dire comment une puissance totalitaire victorieuse les traiterait? La politique King-Lapointe ├⌐tait le fruit de minutieux calculs. Le Premier ministre continuait ├á brouiller les cartes, tandis que son bras droit, parlant au nom du Qu├⌐bec et s'adressant au Qu├⌐bec, disait ├á ses concitoyens que le Canada n'├⌐tait pas -- n'avait jamais r├⌐ellement ├⌐t├⌐ -- une ┬½maison ├á l'├⌐preuve du feu┬╗.
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  13.      De mars ├á septembre 1939, le Canada attendit, comme le reste du monde, que la guerre ├⌐clate. Dernier signe du monde paisible qui allait bient├┤t dispara├«tre, le roi Georges VI et la reine Elizabeth firent une visite officielle en mai et juin 1939, pour la plus grande joie du Premier ministre royaliste et de la population anglophile. Leur visite contribua indirectement ├á renforcer le sentiment d'appartenance qu'├⌐prouvaient les Canadiens (sp├⌐cialement les Canadiens anglais) vis-├á-vis de la Grande-Bretagne. Finalement, apr├¿s s'├¬tre prot├⌐g├⌐ par un pacte avec l'Union sovi├⌐tique, Hitler envahissait la Pologne le 1er septembre 1939. La Grande-Bretagne d├⌐clarait la guerre ├á l'Allemagne le 3 septembre. Apr├¿s avoir attendu que la Chambre des Communes et le S├⌐nat soient assembl├⌐s en s├⌐ance sp├⌐ciale, King et Lapointe amen├¿rent le Parlement et la population ├á se prononcer presque ├á l'unanimit├⌐ sur une politique qu'ils avaient arr├¬t├⌐e de nombreux mois plus t├┤t. La d├⌐claration des hostilit├⌐s entre le Canada et l'Allemagne se fit le dimanche 10 septembre, peu apr├¿s midi. Le gouvernement avait enfin ├⌐clairci sa politique, longtemps apr├¿s se l'├¬tre fait dicter par la tournure des ├⌐v├⌐nements ├á l'├⌐tranger.
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